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Ce texte est un document de travail de la Campagne "Lucho Presidente"

 Dans le débat électoral, le candidat présidentiel Luis Eduardo Garzón a exprimé une position claire qui propose l’arrêt des fumigations chimiques et de la répression contre les populations (paysans et indigènes), ainsi que les autres stratégies d’éradiquation forcée, qui s’accompagnent de violations du droit humanitaire. Comme le dit son programme de gouvernement, « Lucho » s’est également prononcé en faveur d’ « une reformulation complète des politiques anti-drogues axées sur la santé et l’éducation publique, abandonnant l’approche prohibitionniste et répressive actuelle et ouvrant le débat scientifique et politique sur les alternatives de légalisation au niveau national et international ». 

 Selon ces propositions, non seulement on doit réduire les dommages causés par l’abus de substances « pshychotropes » et par les politiques de contrôle de la demande, mais il faut également, dans les pays où se concentrent les cultures, arrêter d’incriminer les producteurs, premier maillon de l’offre. La « réduction des dommages » (harm reduction) et la dépénalisation de la consommation, constituent une politique incomplète si on continue la guerre du côté de l’« offre ». 

 La Colombie manque d’une politique autonome, basée sur ses conditions et besoins particuliers. Au niveau international, il faudrait redéfinir les termes de la « responsabilité partagée » et rediriger la « répression légimime » (Law enforcement) vers les réseaux financiers, le trafic de précurseurs chimiques et le narcotrafic. 

 Il est clair que la recherche d’alternatives intégrales et positives requiert également des composants structurels économiques et sociaux, comme des politiques démocratiques de réforme agraire et de reconstruction de l’économie paysanne, d’aménagement du territoire et d’emploi.

Document de travail

Frente social y político-Luis Eduardo Garzón
Candidat aux élections présidentielles Colombie 2002

 


Trafic de stupéfiants et stratégies anti-drogue
 

Le problème des drogues implique deux aspects de base qui sont étroitement liés:

Le premier aspect est l'économie illégale de la drogue qui a trois composants de base, (1) la production des récoltes illicites et le traitement des matières premières pour le marché mondial; (2) le trafic, qui inclut non seulement les exportations mais également les activités liées comme le blanchiment d'argent -probablement l'aspect le plus important car il concerne l'économie illégale- (3) en dernier lieu l'abus de stupéfiants et les problèmes liés à la consommation.

Le second aspect concerne les stratégies anti-drogues fondées sur le paradigme du prohibitionniste qui est à la base des stratégies publiques. Les stratégies anti-drogues en Colombie sont étroitement liées au programme bilatéral avec les Etats-Unis. La « narcotisation » du programme bilatéral -aggravée par son influence sur les autres problèmes traités avec Washington- a signifié une perte totale de l'autonomie de la Colombie pour traiter le problème de la drogue, car la gestion de ce problème est devenu un instrument pour la négociation d'autres sujets stratégiques pour le gouvernement.

Au vu de ce qui précède, et dans un souci de trouver une proposition alternative qui différencierait les différents composants du circuit de la drogue, nous suggérons une analyse selon trois niveaux de base, afin d'avoir une idée plus claire des problèmes et des moyens pour les aborder. Le tableau ci-dessous résume cette approche:
Différences entre les niveaux de base du circuit de la drogue et conséquences politiques

 
 
Etapes dans le circuit des drogues illégales  Stratégies Niveaux de gestion par l'état Instances du gouvernement responsables Coopération internationale
Production Développement alternatif Autonomie avec critères coopératifs Environnement, agriculture et développement Coopération technique pour le développement
Traitement et trafic Application de la loi  Accords internationaux de responsabilité partagée  Ministre de la justice, police, pouvoir judiciaire, contrôle financier et Directoire national anti-stupéfiants  Systèmes d’information, accords et répression du blanchiment d’argent, consultance sur la confiscation de biens, coopération judiciaire
Problèmes liés à l'abus et la consommation  Santé publique  Autonomie avec critères coopératifs Santé publique et mairies Expériences vécues de traitement de l'abus de stupéfiants

Drogues et autonomie

Les distinctions proposées montrent qu'il y a deux domaines où il est possible de concevoir des politiques plus autonomes:
  1. Dans le domaine de la production : problèmes des cultures illicites
  2. Dans la domaine de la gestion des problèmes liés à la consommation.
Des propositions partielles de « substitution de cultures », sans stratégie globale visant les différents niveaux du circuit, notamment le trafic, peuvent produire des effets contraires, reproduisant ainsi les échecs répétés du paradigme actuel, qui met l’emphase sur la réduction de l’offre de drogue. Une proposition complète devrait envisager des stratégies adaptées à la réduction des dommages, basées sur les critères suivants:
  1. Les drogues ne peuvent pas être « éradiquées ». La société devrait viser, au travers de mesures variées et efficaces dans des scénarios complexes –y compris l’application de la loi-, une coexistence avec les drogues, et une recherche du dommage minimal pour ceux qui entrent en contact avec celles-ci, comme producteurs ou consommateurs.
  2. Le niveau de production ou d’abus de drogue dépend principalement de conditions sociales, économiques et culturelles qui varient d’une région et d’un pays à l'autre. Le trafic de la drogue, lui, est de nature internationale et profite de ces scénarios, stimulant à la fois les deux extrémités de la chaîne et amassant les bénéfices les plus importants, qui profitent également les grands capitaux « légaux » et illégaux de la planète globale. Il est par conséquent extrêmement difficile qu'en se concentrant sur les régions de production, où le problème est intimement lié aux carences structurales, nous puissions résoudre une situation globale, complexe et conflictive.
  3. L’existence de monocultures de coca, de pavot et de marijuana génère une série de problèmes pour ces régions comme l'instabilité sociale, économique et écologique, avec de graves conséquences pour l’autosuffisance alimentaire, l'utilisation efficace de la biodiversité, la préservation socio-culturelle des communautés indigènes; elle altère les processus d’occupation en Amazonie et dans les autres zones de colonisation; finalement, elle fait des producteurs les cibles d’une guerre injuste.
  4. Le fait que les groupes armés soient partiellement responsables de l'existence et du contrôle des cultures illicites, dans le cadre d'une guerre qui est en partie financée par ces ressources, en fait des acteurs incontournables dans la recherche de solutions. Ces solutions devraient naturellement être conformes aux obligations contractées lors des négociations de la paix, avec en contrepartie le respect par l’Etat des devoirs qu’il a en cette matière.

Proposition

a. Production: Propositions alternatives à la dépendance de monocultures illicites.

Cette proposition doit être encadrée dans les programmes sociaux et économiques de développement à niveau régional. En d'autres termes, l'impact des politiques intégrales de développement rural et écologique servira de cadre de prise de décisions qui aillent bien au-delà d’actions de « substitution » de cultures illicites par des activités productives légales.

La réduction du traitement du problème à des « projets » et leur financiation (comme cela a été le cas jusqu'à présent) n'est absolument pas un principe de gestion approprié, s’il ne s’inscrit pas dans le cadre de stratégies prédéfinies et d’une politique nationale dans le domaine des drogues.

En termes de production, la politique se concentre sur:

  1. l’arrêt des fumigations
  2. des alternatives de développement concertées avec les communautés impliquées et mises en application par des mesures graduelles de substitution, à partir d’investissements focalisés qui considèrent l'utilisation rationnelle des territoires conformément aux exigences écologiques.
  3. la décriminalisation des petits producteurs
  4. l’implication franche des acteurs armés, pour une solution au problème de la drogue dans notre pays à partir d'une redéfinition du processus de paix, incluant la participation autonome des communautés impliquées dans ce processus économique.
  5. l'assurance que la paix, la sécurité personnelle, et le droit humanitaire international seront respectés dans la mise en oeuvre de cette politique dans les territoires impliqués dans ce processus économique.

b. Trafic et transformation

Le critère de base est

Une politique des drogues pour la Colombie qui contiendrait des concepts et des pratiques de co-responsabilité internationale.

  1. Sur la base de définitions autonomes tant pour la production que pour les problèmes liés à la consommation, nous reconnaissons que le trafic des stupéfiants est un problème de portée internationale, et qu’il requiert donc des accords et de façon générale une politique de co-responsabilité qui aille au-delà de la distorsion qui caractérise actuellement ce domaine.
  2. La communauté internationale devrait mettre lui-même un certain nombre de buts au sujet des aspects suivants:
  3. Blanchiment d’argent
  4. Contrebande d’armes
  5. Contrebande de biens
  6. Exportations de précurseurs chimiques pour la transformation
  7. Surveillance adaptée des laboratoires de production de drogues synthétiques
  8. Gestion de la prolifération d’économies illégales, largement financées par le trafic des drogues dans les pays du nord, associées à des réseaux internationaux de prostitution, de trafic de personnes, de casinos et établissements de jeu, qui leur servent de couverture.
  9. Politiques de saisie de biens acquis par les narcotraficants.
  10. Réformes institutionnelles conçues pour lutter contre le trafic, principalement dans:
A partir de ces accords sûrs et tangibles de la part de la communauté internationale, la Colombie pourra s’engager sur des objectifs liés à la production, avec une autonomie entière de gestion de ce problème.

c. Problèmes liés à la consommation

  1. Redéfinir ces problèmes comme relevant du domaine de la santé publique
  2. Emphase sur la réduction des dommages causés par les drogues, mais surtout par les politiques utilisées aujourd’hui dans la lutte antinarcotiques.
  3. Redéfinitions des institutions en fonction de ces critères. Les autorités de la Santé, et non les autorités répressives, seront chargées des programmes de gestion de l'abus de stupéfiants. Ce principe devrait être appliqué à la fois aux niveaux administratifs municipaux et dans tout le pays.
  4. Approches légales et institutionnelles vers la décriminalisation des doses personnelles d’utilisation de la drogue. On devrait suivre les précédents légaux en Colombie, comme la décision du Conseil Constitutionnel, en 1994, au sujet de la consommation personnelle, et s’aligner sur ces décisions au niveau des institutions responsables et des politiques publiques.
Traduction : Jean-Marc Langé (MamaCoca)

[1] les institutions sont actuellement extrêmement désorganisées, avec des recouvrements de fonctions entre instances différentes, faute d’une stratégie cohérente qui stipule les responsabilités de chacune.
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